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Jeanne Guillet, la femme chocolat

Depuis septembre 2021, La Maison Pierre Marcolini est dirigée par une femme. Jeanne Guillet a travaillé pour de grands noms du monde de la pub et du marketing comme Publicis avant de piloter l’entrée de la marque belge sur le marché chinois.

L’an prochain, la Maison Pierre Marcolini fêtera son trentième anniversaire. Depuis un tout petit peu plus d’un an, la PME bruxelloise est aux mains de MBK Partners, un fonds coréen, via VM2 Holding, un groupe japonais qu’il contrôle et qui était déjà actif dans le secteur avec Godiva. L’arrivée de ce nouvel actionnaire de référence est une excellente nouvelle pour la croissance et les perspectives d’avenir de notre chocolatier haut de gamme. La transformation de l’entreprise en un acteur international est pilotée par Jeanne Guillet. Devenue CEO en septembre 2021, elle avait auparavant piloté le développement chinois de la marque (9 boutiques aujourd’hui).

« Je n’ai pas un parcours linéaire », sourit la quadragénaire française, très discrète dans la presse. « J’ai passé une bonne dizaine d’années dans les grands groupes de pub et de communication comme Dentsu ou Publicis. Je suis partie en Chine en 2011 avec, comme mission, de monter une agence Publicis Luxe à Shanghai. Il n’en existait qu’à Paris et à New York. C’était le début de la Chine comme nouvel eldorado du luxe mondial et il était crucial d’y penser la communication localement car les jeunes femmes n’y ont ni les mêmes codes ni les mêmes repères culturels. J’ai adoré ces quatre années-là mais j’ai toujours eu la fibre entrepreneuriale. Quand en 2017, j’ai rencontré Pierre et l’actionnaire de référence de l’époque à Shanghai, ce fut, pour moi qui suis passionnée d’alimentaire à titre personnel, le match parfait. Lancer en Chine une marque haut de gamme qui fait la part belle à l’artisanat et à l’excellence était un cadeau. Pour autant, ce ne fut pas une mince affaire car nous n’avions aucun repère. Peu de marques avaient réussi et il n’y avait donc pas de recette miracle. Après deux ou trois erreurs, on a fini par trouver un business model qui fonctionne et la marque a décollé. »

marcolini jeanne guillet
© Maurine Wilmus

Jeanne Guillet a aussi, dans la foulée, récupéré le business japonais de la marque (neuf boutiques) qui avait été lancé il y a un quart de siècle par un distributeur local, fan de Marcolini. A la sortie de la pandémie, après le départ de Renaud Mazière et l’intérim d’Olivier Coune, elle s’est vue proposer le poste de CEO. Un poste qui lui va comme un gant puisqu’avec le nouvel actionnaire, la croissance s’annonce asiatique.

« 50 % de notre chiffre d’affaires demeure européen », souligne Jeanne Guillet. « Il n’est pas question de négliger les marchés belge, français, britannique ou luxembourgeois, mais, à côté de notre présence à Dubaï et Doha, c’est l’Asie qui va concentrer nos efforts. On vient d’arriver à Séoul. Notre nouvel actionnaire nous a ouvert les portes de Shinsegae, le plus grand department store du monde sis en plein cœur du célèbre quartier de Gangnam. Une deuxième boutique arrive sous peu. Taïwan ouvrira tout bientôt et nous regardons aussi Hong Kong. L’entreprise est rentable aujourd’hui. Cela n’a pas toujours été le cas et la pandémie ne nous a pas fait du bien. Mais, avec MBK Partners, ce sont cinq belles années de croissance qui s’annoncent. »

Si Jeanne Guillet dirige l’entreprise forte aujourd’hui de 400 personnes, Pierre Marcolini en demeure l’âme créatrice et son plus bel ambassadeur. Il donne aussi de la visibilité mondiale à sa philosophie du bean-to-bar. Cette présence, forte, n’est pas forcément simple à gérer.

« Pierre est emblématique et dirige toute notre création », confie Jeanne Guillet. « Mais cela fait huit ans que nous travaillons ensemble et nous nous connaissons bien. C’est une relation riche car nos compétences se complètent et la confiance est mutuelle. Pierre a mille idées à la minute et est tout aussi passionné qu’il y a trente ans. C’est une chance inouïe pour l’entreprise mais oui, il faut parfois le freiner. Je dois veiller à ce que ses idées soient encapsulées dans une stratégie qui fonctionne et donne des résultats. Je dois cadrer. Nous ne sommes pas d’accord sur tout mais parfaitement alignés sur les valeurs de l’entreprise. »

« Avec Pierre Marcolini, nous avons une relation riche car nos compétences se complètent et la confiance est mutuelle »

De par son expérience, Jeanne Guillet apporte une dimension internationale à une PME qui en manquait sans doute. Rare femme CEO en Belgique, elle pilote une entreprise très largement féminine et résolument ancrée en Belgique. Tous les chocolats, macarons et glaces sont fabriqués dans l’atelier de Haren (Bruxelles) qui va s’agrandir sous peu avec le rachat du bâtiment voisin. 80 artisans y travaillent dont 30 femmes.

Avec sa collègue Alissa, Célina anime le département RD de la Maison sous la supervision du chef de l’atelier. © Maurine Wilmus

« Le comité de direction est paritaire chez nous », conclut Jeanne Guillet. Avec les boutiques, c’est assez logique que les femmes soient majoritaires. Mais je suis ravie qu’elles soient aussi très présentes dans l’atelier, entre autres dans des fonctions managériales. Sous la supervision du chef Laurent, ce sont d’ailleurs deux femmes, Célina et Alissa, qui animent notre département R&D. Elles testent et affinent les demandes de Pierre Marcolini. Nous avons aussi des bureaux au Japon et en Chine. En Chine, l’équipe est 100 % féminine. Les femmes sont très présentes dans le business chinois et, à Shanghai, elles détiennent majoritairement le retail et le luxe. »

La Maison Pierre Marcolini est majoritairement féminine. Dans les ateliers d’Haren, la parité est quasiment de rigueur. © Maurine Wilmus

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