Le Luxembourg Institute of Socio-Economic Research (Liser) porte le projet de création d’un observatoire regroupant le marché du logement luxembourgeois à ses voisins directs lorrain, wallon et allemand.
Selon nos collègues de Paperjam, qui relaie l’avis du très sérieux Luxembourg Institute of Socio-Economic Research, le marché du logement n’évolue pas dans le bon sens ni au Luxembourg ni dans les régions limitrophes. Et un point de vue capital est absent pour analyser et influencer ces dynamiques couplées, aujourd’hui soumises aux seuls aléas du marché. «On ne peut pas continuer à réfléchir en s’arrêtant à la frontière : il nous manque une perspective plus globale et comparative», indique Magdalena Gorczynska-Angiulli, chercheuse au Liser.
Raison pour laquelle l’institut luxembourgeois milite pour la création d’un Observatoire transfrontalier. Un dossier en ce sens a été déposé en décembre dernier pour solliciter un financement européen (Interreg) permettant la création de cet observatoire transfrontalier. Si les lignes de crédit sont accordées (réponse dans le courant de l’année), le nouvel organisme démarrerait ses travaux dès 2026, afin de «mieux comprendre les défis et structurer les connaissances», résume la chercheuse, interrogée par Paperjam.
Epicentre d’un marché tendu
Si le Luxembourg apparaît en première ligne dans cette initiative, c’est qu’il s’agit actuellement de l’épicentre d’un bassin résidentiel sous tension s’étendant toujours davantage en direction des régions transfrontalières proches. Sont concernées la Wallonie, la Moselle – Meurthe-et-Moselle, la Rhénanie-Palatinat et la Sarre, où les prix pratiqués sont directement influencés à la hausse depuis plusieurs années déjà par ceux pratiqués au Luxembourg. Depuis 2005, les prix y ont explosé de +117% pour une maison et +164% pour un appartement.
Pour Antoine Paccoud (Liser), il y a donc urgence à agir en concertation: «Le pays a pris trop tardivement la mesure de l’impact de son développement économique et démographique sur les conditions de logement des ménages». Un marché du logement transfrontalier s’est, depuis plus de 20 ans déjà, progressivement mis en place, avec tous les effets collatéraux liés. Cette réponse improvisée au manque de logements au Luxembourg montre aujourd’hui clairement ses limites: augmentation des coûts du logement pour les populations de ces régions ne travaillant pas au Luxembourg, temps d’accès au travail excessifs (mobilité), complexités administratives pour les frontaliers, etc.
Or, pour l’instant, chaque pays analyse la situation de son côté en s’arrêtant artificiellement et bêtement à la frontière. Et il n’existe aucune coordination pour étudier la mobilité résidentielle transfrontalière. Selon le Liser, une approche alignée et partagée est essentielle pour comprendre et contribuer à la création d’une stratégie ou d’une politique cohérente et interrégionale du logement fondée sur des indicateurs objectifs correspondant à la nouvelle réalité de terrain transfrontalière.
Elargir le spectre et le rayon d’action commun
Pour la rédaction d’une récente publication ciblant le logement, le Liser a déjà ouvert la voie en «embarquant» à ses côtés ses homologues du laboratoire de recherche Lepur de l’Université de Liège, de l’Agence d’urbanisme et de développement durable (Agape) Lorraine-Nord et les universités de Trèves et de la Sarre. Il s’agissait là d’un premier pas vers de futurs travaux collectifs.
L’Observatoire que l’institut luxembourgeois appelle de ses voeux entend cibler, s’il voit le jour prochainement, trois éléments clés: le foncier, le logement et la population concernée. L’objectif est de croiser les données transfrontalières et d’élaborer des indicateurs fiables. «Un vocabulaire commun et des définitions claires seront nécessaires, notamment pour des éléments comme la surface des logements et les classes énergétiques, où les définitions varient considérablement d’un pays à l’autre», prévient déjà Magdalena Gorczynska-Angiulli.
In fine, l’Observatoire transfrontalier est censé diffuser des rapports thématiques et proposer des événements en lien avec le logement. Il ne s’agira pas seulement de décrire une situation existante; mais aussi de sensibiliser le public et les décideurs à la création d’une stratégie ou d’une politique spatialisée du logement.