La start-up gantoise LegalFly, fondée par quatre anciens employés de Tinder, a développé une solution IA pour les cabinets d’avocats et les équipes juridiques des entreprises leur permettant de rédiger et relire rapidement des documents juridiques. « En automatisant les tâches répétitives grâce à l’IA, nous doublons les économies en matière de coût et gagnons en efficacité », se félicite Ruben Miessen, CEO de LegalFly.
Ruben Miessen partage avec ses associés Kasper Verbeeck, Dennis Montégnies et Gregory Vekemans un passé d’ingénieur produit chez Tinder. « Nous sommes passés de l’industrie la plus sexy à la moins sexy », s’amuse Ruben Miessen, CEO de LegalFly. Chez Tinder, les quatre hommes avaient en charge toutes les initiatives en matière d’IA, telles que la création de phrases d’accroche personnalisées. Lors de leurs réunions hebdomadaires, ils ont remarqué que les équipes juridiques constituaient souvent un frein dans la prise de décisions. « Après avoir quitté Tinder, le choix du secteur pour lequel nous voulions construire une solution IA s’est donc imposé rapidement. »
Trop cher
En 18 mois d’existence, LegalFly a déjà réussi à susciter un véritable engouement. « Les cabinets d’avocats ont le sentiment que l’IA crée des remous auxquels nul n’échappe », explique Ruben Miessen. « Ils ressentent également la pression des clients pour innover et jeter un regard critique sur leur modèle d’entreprise, lequel repose sur les heures facturables. Les clients réclament depuis des années un tarif forfaitaire, en particulier pour les tâches répétitives telles que la rédaction et la révision de documents transactionnels ou de contrats. Autant d’opérations qu’ils pourraient effectuer eux-mêmes avec quelques connaissances juridiques. Dans les conversations avec les clients des cabinets d’avocats, c’est aussi ce qui ressort le plus souvent : les procédures sont trop longues et trop chères. »
« Certains cabinets d’avocats ont déjà nommé un responsable IA à temps plein, ce qui n’est pas encore le cas dans d’autres secteurs »
Le secteur est prêt à innover. « Certains cabinets d’avocats ont déjà nommé un responsable IA à temps plein, ce qui n’est pas encore le cas dans d’autres secteurs. » LegalFly compte parmi ses clients un grand nombre de cabinets d’avocats européens de premier plan, ainsi que des compagnies d’assurance et des entités financières. La start-up gantoise a également établi des partenariats avec des acteurs mondiaux tels que Slaughter and May et Allianz.
Safety first
LegalFly a développé une gamme de modèles d’IA juridique pour automatiser les services juridiques et augmenter la productivité. La start-up se distingue par l’importance qu’elle accorde à la protection de la vie privée. « Nous sommes les seuls à pouvoir garantir que les données sensibles des clients restent entre les murs de l’entreprise. Les contenus juridiques sont automatiquement anonymisés avant d’atteindre les LLM (Large Language Model, ndlr). Nos modèles d’IA ne s’entraînent pas davantage en fonction des données fournies par les clients. »
« Pour chaque scénario juridique, nous sélectionnons le meilleur modèle »
La start-up fait appel à plusieurs LLM. « Dépendre d’un seul LLM constituerait un risque énorme, car nous travaillons dans un secteur qui évolue à toute vitesse. Pour chaque scénario juridique, nous sélectionnons le meilleur modèle, celui qui se révèle le plus performant. C’est un plus en termes d’efficacité, mais aussi de sécurité. »
Les clients peuvent utiliser la fonction Review pour vérifier la conformité des contrats et identifier les risques commerciaux. « Une fois le contrat uploadé sur notre plateforme, vous obtenez une analyse instantanée. Les équipes juridiques soulignent que le processus de révision est 60 % plus rapide : des jours entiers de travail ramenés à quelques heures », déclare Ruben Miessen. LegalFly optimise également la rédaction des contrats en la rendant rapide, intuitive et conforme aux normes. « Grâce aux fonctions Discovery et Training, les clients peuvent demander des conseils juridiques et personnaliser leur IA juridique en uploadant des documents juridiques et financiers de leur entreprise. »
Une croissance rapide
LegalFly opère au Royaume-Uni, en Belgique, aux Pays-Bas, en Suisse, en France et en Allemagne et prévoit d’ouvrir un bureau à New York. Après un tour de financement d’amorçage de 2 millions d’euros en novembre 2023, la start-up a levé plus de 15 millions d’euros lors d’un financement de série A mené par Notion Capital en juillet, avec la participation de redalpine, Fortino Capital et des Américains de Bond Capital. Grâce à ce financement, LegalFly entend accroître son expansion en Europe et renforcer ses partenariats avec des cabinets d’avocats et des entreprises de premier plan. De quoi ouvrir la voie à une nouvelle génération de services juridiques.
L’investissement renforce également l’ambitieux plan de croissance de LegalFly, qui prévoit de tripler l’équipe actuelle pour atteindre environ 50 employés d’ici la fin de l’année. Le People and Culture Manager, fraîchement engagé, est chargé non seulement d’attirer les meilleurs talents, mais aussi de veiller à la satisfaction des employés actuels. « Nous travaillons également avec des chasseurs de têtes, car nous ne pouvons pas tout faire nous-mêmes », précise Ruben Miessen. « Heureusement, nous sommes basés à Gand, qui est en passe de devenir la capitale de l’IA en Belgique. Il y a beaucoup de talents dans les scale-up et à l’université. »
Introduction en bourse
Pas de rachat en vue pour LegalFly. La start-up gantoise souhaite plutôt devenir un leader sur le marché afin de préparer une introduction en bourse. « C’est un travail de longue haleine, mais c’est ce que nous visons. »
Aujourd’hui, l’accent est mis principalement sur le B2B, mais il est prévu d’intégrer le produit dans Microsoft Teams ou Slack, par exemple, d’ici un an ou deux. « À l’avenir, les agents juridiques de l’IA pourront négocier entre eux pour que le contrat soit accepté par les deux parties. »
Les avocats ne doivent pas craindre pour leur emploi. « On ne peut pas automatiser les litiges ou les plaidoiries au tribunal », conclut Ruben Miessen. « Ces tâches incombent toujours à un être humain en chair et en os. Notre solution d’IA juridique se concentre sur les opérations les plus répétitives et chronophages, celles que l’avocat n’aime pas réaliser lui-même. »